Intervention de Catherine Perret

Séance en hémicycle du lundi 27 février 2023 à 16h00
Retraites et protection sociale dans la fonction publique

Catherine Perret, secrétaire confédérale de la CGT chargée des questions de retraite :

Mon intervention portera principalement sur la question des retraites, même si, comme M. Quercioli vient de le souligner, la protection sociale est un tout. Nous pourrons ainsi revenir sur la protection sociale complémentaire, dont le volet santé a été récemment négocié et dont le volet prévoyance reste en cours de discussion. La CGT défend un projet de sécurité sociale intégrale, qui place cette dernière au centre de la prise en charge des risques, de la naissance jusqu'à la mort, et qui limite le périmètre d'activité des mutuelles à la prévention et à la santé publique. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans le cadre de nos échanges ultérieurs.

La réforme en cours présente divers enjeux pour la fonction publique. D'abord, bien que le Gouvernement affirme depuis plusieurs semaines mener une réforme paramétrique, nous estimons au contraire qu'il défend bien, à travers le projet de PLFRSS dont vous avez débattu, une réforme systémique, puisque son texte vise à modifier complètement l'organisation des différents régimes de retraite existants, au cœur desquels se trouve celui de la fonction publique.

Certains régimes spéciaux sont déjà dans le collimateur du Gouvernement. Même si, pour l'heure, la survie du régime de la fonction publique ne semble pas complètement remise en cause, le texte transmis au Sénat comprend un article supplémentaire – l'article 1er bis – prévoyant la remise au Parlement d'un rapport sur les conditions de mise en œuvre d'un système universel de retraite. On perçoit ainsi clairement la volonté du Gouvernement de faire disparaître les régimes spécifiques. En cela, la réforme en cours d'examen est bien une réforme systémique, qui vise à faire basculer, à terme, les agents des trois versants de la fonction publique dans le régime général applicable aux salariés du privé.

Quelles raisons motivent ce choix ? Très peu d'arguments et d'éléments financiers sont avancés, car il n'y a, en réalité, aucune raison de faire disparaître le régime de retraite de la fonction publique, qui est particulièrement bien financé et bien géré, à tel point que son seul problème réside dans le manque de fonctionnaires. Vous devez le savoir, vous qui connaissez bien vos circonscriptions respectives : tout le monde cherche des soignants, des enseignants et, de manière générale, des fonctionnaires pour répondre aux besoins de la population. Il suffirait ainsi de recruter 300 000 agents de la fonction publique de l'État et 300 000 soignants dans la fonction publique hospitalière pour couvrir le déficit de 13 milliards d'euros brandi par le Gouvernement pour justifier cette réforme brutale. La question de l'emploi dans la fonction publique est donc majeure pour assurer l'équilibre financier du système et pour définir ce que nous voulons faire de nos retraites à l'avenir.

La réforme ne se justifie pas non plus par des considérations relatives à l'emploi. Le Gouvernement explique régulièrement que le fait de reporter à 64 ans l'âge de départ en retraite incitera les seniors à travailler plus longtemps. L'épine dans le pied du ministre Olivier Dussopt, c'est en effet que plus de 60 % des salariés ne sont plus en emploi lorsqu'ils atteignent l'âge légal de départ. Or ce problème ne se pose pas dans la fonction publique, où chacun reste en poste jusqu'à l'âge légal. La moyenne d'âge des fonctionnaires partant à la retraite s'établit d'ailleurs déjà à 64 ans. Pourquoi, alors, nous mobiliser dans la rue contre cette réforme, me demanderez-vous ? Parce que le fait que les fonctionnaires travaillent jusqu'à 64 ans est la conséquence des réformes régressives, qui, depuis 2003, ont conduit à reculer l'âge légal de départ, mais surtout à augmenter le nombre de trimestres nécessaires pour percevoir une retraite à taux plein.

Ainsi, la véritable motivation de cette réforme – qui touche tous ceux qui travaillent, mais plus particulièrement les fonctionnaires – n'est pas tant de reculer l'âge de départ que de faire baisser plus rapidement le niveau des pensions, que ce soient celles des fonctionnaires ou celles des salariés du secteur privé. Ce constat est parfaitement documenté : le double effet du recul de l'âge légal de départ et de l'allongement de la durée de cotisation nécessaire pour percevoir une retraite à taux plein accentue l'accélération de la baisse des pensions et accroît donc les économies que le Gouvernement entend faire sur le dos des fonctionnaires.

Un deuxième élément doit retenir votre attention : il s'agit de la question, évoquée lors du débat précédent, des départs anticipés. S'agissant de la fonction publique, l'enjeu de la réforme en cours concerne l'existence, dans certains répertoires de métiers, de droits à départ anticipé, que le Gouvernement voudrait voir disparaître. Le ministre du travail a été très clair sur ce point : il veut remplacer les droits collectifs, liés au métier exercé, par des dispositifs individualisés. Tous les régimes spéciaux qu'il entend supprimer, comme celui de la fonction publique, sont porteurs de droits collectifs qui permettent aux corps de métiers concernés de bénéficier de conditions de départ spécifiques, du fait des missions de service public qu'ils exercent et des situations de travail pénibles – parfois très diverses – auxquelles ils sont exposés. J'insiste sur la notion de missions de service public : il n'est pas nécessaire de travailler jour et nuit pour être exposé à la pénibilité. Il suffit d'agir au service de l'intérêt général et d'être, par exemple, appelé à sortir pour dégager les routes et aider la population après une tempête. L'exercice de telles missions de service public, souvent très pénibles, justifie évidemment que les membres du corps de métier concerné puissent partir à la retraite de façon anticipée.

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